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Dernière mise à jour : 01/03/2020

Voir aussi Masses virtuelles et masses réelles

Présentation

Les montages qui suivent permettent d'obtenir deux tensions symétriques, une positive et l'autre négative par rapport à la masse, en partant d'une alimentation simple (monotension). Mais attention, ces montages ne conviendront pas dans toutes les situations, notamment là où de fortes intensités de courant sont requises. Ils ne peuvent prétendre pouvoir remplacer une bonne alimentation symétrique, mais vous permettront tout de même d'expérimenter avec ce type d'astuce.

Avertissements

- Ajouter une masse "virtuelle" peut apporter une certaine confusion avec une masse "réelle" existante. Réfléchissez bien à ce que vous devez faire pour exploiter ce type de montage, notamment au niveau des liaisons audio et des polarisations. N'hésitez pas à consulter et comparer plusieurs schémas existants, alimentés sous tension simple ou sous tensions symétriques, afin de vous faire une idée générale. Au besoin, reportez-vous à la page Masse virtuelle et masse réelle, ou encore au montage Distributeur audio 001, qui aborde le point  de façon pratique. Enfin je l'espère  ;-).
- Ce type de montage permet d'obtenir une alimentation (pseudo-)symétrique à partir d'une alimentation simple, les deux tensions symétriques obtenues auront chacune pour valeur la moitié de la tension d'origine. Ainsi, avec une alimentation simple de 18 V, vous obtiendrez une alimentation symétrique de +/-9 V. Et avec du 12 V, vous obtiendrez +/-6 V. Si vous souhaitez obtenir du +/-12 V avec une tension simple de 12 V, les méthodes décrites ici ne conviennent pas, il faut utiliser ce qu'on appelle des convertisseurs de tension continue/continue (DC/DC Convertor, quelques schémas proposés via page Alimentations).

Schéma 001

Il s'agit de la solution la plus simple, qui convient très bien pour pouvoir utiliser des AOP faible consommation nécessitant habituellement une source d'alimentation symétrique.

Masse virtuelle 001

Les résistances R1 et R2 ont la même valeur et sont montées en diviseur de tension. Leur valeur doit être identique, et devra être adaptée selon la consommation globale du circuit à alimenter (10Kohms pour 1mA, jusqu'à 100Kohms pour 100uA par exemple). L'unique condensateur C1 sert à "absorber" les variations de courant tant qu'elles ne sont pas trop importantes, et permet d'assurer une certaine stabilité à la tension présente au point 0V' (J4). Ce condensateur joue en effet le rôle d'un réservoir d'énergie, comme ceux de forte valeur utilisés dans les alimentations classiques, et permet de fournir les pointes de courant que ne peuvent "supporter" les résistances. Malheureusement, et malgré la présence du condensateur, la fluctuation de la tension 0V' (J4) en fonction du courant consommé en ce point peut tout de même être élevée et poser des problèmes de stabilité voire de distorsion. Seule solution : baisser la valeur des deux résistances R1 et R2, ce qui se fait au détriment de la consommation globale, qui augmente alors. Si vous êtes un habitué des schémas électroniques de type audio basés sur l'emploi d'AOP, vous devez sans doute avoir déjà rencontré ce type de montage pour délivrer une tension dite "masse virtuelle" ou "masse flottante", et permettant de polariser les AOP à la moitié de la tension d'alimentation (dans ce contexte, ça fonctionne très bien, car les AOP consomment généralement peu de courant).
Important : pour qu'au point 0V' (J4) il existe une tension égale à la moitié de la tension d'alimentation, il faut que le courant drainé à cet endroit soit faible par rapport au courant qui circule déjà dans les deux résistances (au maximum 1/10).

Masse virtuelle 001a

On comprend bien en effet que si ce n'est pas le cas, la résistance R1 sera traversée par un courant plus important que celui traversant R2 (puisque I1 = I2 + I3), et l'égalité des tensions ne sera plus du tout respectée (la tension sur R1 sera supérieure). Ce système ne convient donc pas pour des montages qui consomment "beaucoup" sur le point 0V' (J4). Mais attention aussi à ne pas trop descendre la valeur des résistances R1 et R2, car si l'idée en elle-même est parfaitement juste, la consommation globale du montage en souffrirait. Et surtout un danger apparaît pour ces résistances. Quel danger ? Je vais vous donner un exemple. Un jour, des étudiants sont passés chez moi pour discuter de la fabrication de Theremins. Ils en avaient fabriqué un, et à un endroit du montage, il avaient monté ce type de pont diviseur avec des résistances de 47 ohms, le montage fonctionnant sur une pile 9V, et des AOP réclamant leur dû. Cela fonctionnait. Mais un jour, ils ont remplacé la pile 9V par un 15V d'une alim labo. Et là... ça sentait le chaud, et ça s'est mis à fumer... Pourquoi ? Calculons le courant qui circulait alors dans les résistances avec l'alim de 15V (dans les calculs suivants, I3 est ignoré) :
I = U / R  =>  15 / (2 * 47) = 0,16 A.
Puissance dissipée :
P = U * I = (U * U) / R  =>  7,5 * 0,16 = 1,2 W
On peut dire que les pauvres résistances de 47 ohms / 0,5W n'avaient pas beaucoup de chance de survie ! Disons que l'on peut rester raisonnable en ne descendant jamais sous 1 KOhm. Si vos calculs vous indiquent des valeurs inférieures, réflechissez plutôt à une autre solution, celle-là ne convient très surement plus. Notons que sous 9V, la puissance dissipée était tout de même de 0,72 W, les résistances ne fumaient pas, mais étaient tout de même un peu stressées. En fait, elles n'avaient pas vraiment le temps de brûler, car la pauvre pile de 9V à qui l'on demandait de fournir un courant de 0,16A (au minimum) demandait vite pitié.

Variations autour du schéma 1

On peut trouver dans certains schémas, deux condensateurs au lieu d'un seul :

electronique_masse_virtuelle_001b

Si certains conseillent cette méthode pour des applications audio, d'autres ne la valident pas du tout. Le condensateur du haut contribue en effet à propager sur le point médian (masse virtuelle) et dans un rapport de 1/2, le bruit véhiculé sur la ligne d'alimentation principale. Notez au passage que vu de la source d'alimentation unique (entre J1 et J2), les deux condensateurs ainsi reliés en série forment un condensateur équivalent dont la valeur est moitié de chacun d'eux (si les deux condensateurs valent 100 uF, le condensateur équivalent vaut 50 uF). Dans certains schémas "anciens", il arrive également de trouver des diodes zener en lieu et place des deux résistances du pont diviseur, comme le montre le schéma suivant :

electronique_masse_virtuelle_001c

Ces diodes zener offrent une résistance dynamique faible, ce qui est mieux pour ce genre d'application. Mais elles apportent aussi une contribution au bruit que certains jugent trop importante, même si ce bruit peut être réduit par la présence de condensateurs montés en parallèle sur chacune d'elle. Comme pour toute régulation par zener, la résistance de limitation de courant (ici R1) doit être calculée en fonction de la tension source, des tensions de sortie désirées, et du courant consommé au point de masse virtuel. Dans d'autres montages encore, la création des deux sources symétriques se fait encore plus "virtuellement", sans résistance et avec seulement deux condensateurs.

masse_virtuelle_001d

On retrouve par exemple ce type de formule dans le multimètre PANTEC PAN-3003, où trois AOP sont alimentés via une unique pile de 9 V, pour une consommation totale de 6,5 uA, ce qui est très faible. Heureusement, car avec ce type de montage, l'impédance de la source d'alim virtuelle est plutôt élevée (on met à profit la résistance parasite des condensateurs grâce à laquelle on a un courant de fuite non nul)...

Schéma 002

Ce schéma est une version améliorée du premier montage à deux résistances, auquel on a ajouté un AOP.

Masse virtuelle 002

La tension 0V', qui correspond là aussi à la moitié de la tension d'alimentation présentée entre les points J1 et J2, est cette fois rendue disponible sous une impédance plus faible, qui est en fait celle de la sortie de l'AOP. La fluctuation est plus faible que précédemment pour un même courant consommé, et surtout permet la fourniture d'un courant plus important. Le courant circulant dans les résistances R1 et R2 est bien plus faible, ce que permet la haute impédance d'entrée de l'AOP. Mais cela nécessite l'ajout d'un composant, ce qui n'est pas toujours la première solution recherchée. Une astuce : s'il vous reste un AOP de libre dans un boitier (genre montage nécessitant 3 AOP et se basant sur un TL084), n'hésitez pas à mettre à contribution le petit isolé...

Remarques :

Schéma 003

Ce schéma est réservé à ceux qui veulent un (relativement) bon montage et qui sont allergiques aux AOP pour ce type de fonction. Il peut se contenter de composants de fond de tiroir, le 2N2222 peut être remplacé par exemple par un 2N3904, et le 2N2907 peut être remplacé par exemple par un 2N3906.

Masse virtuelle 003
Schéma 003

Ce montage, tout comme le précédent, permet de fournir un 0V virtuel sous basse impédance, grâce à l'utilisation de transistors d'usage général (entendez courants, bon marché et faciles à trouver). Les diodes sont destinées à compenser les chutes de tension dans les jonctions base-émetteur des transistors. Les condensateurs C1 à C4 permettent de lisser les tensions de sortie, en absorbant les variations de courants. Il ne s'agit finalement que de simples condensateurs de découplage d'alimentation comme on en rencontre tant...

Une variante de ce montage est proposée par Sijosae :

masse_virtuelle_003b
Schéma 003b

Notez que les condensateurs sont montés en entrée du montage et non en sortie.

Schéma 004

Et pour terminer (provisoirement), voici un mélange de ce qui a été vu avant.

Masse virtuelle 004
Schéma 004

Ce montage permet un débit de courant de 1 A pour la partie positive et autant pour la partie négative. Un exemple d'alimentation complète utilisant ce circuit est présenté à la page Alimentation symétrique 007. Vous pourrez remplacer les transistors par un couple BDX88C et BDX87C afin de porter le courant disponible à 2 A. Notez toutefois que ces débits ne sont possibles que si les transistors sont montés sur un radiateur de dimensions suffisantes ! Une variante du schéma qui précède est visible ci-après, elle met en oeuvre des transistors darlington TIP122 (NPN) et TIP127 (PNP) et des diodes et résistances ont été ajoutées. Le courant max de sortie est de l'ordre de 2,5 A.

masse_virtuelle_004b
Schéma 004b

L'AOP est cette fois un LF351 mais on peut là encore normalement utiliser un LM741. Un condensateur de valeur comprise entre 10 et 100 uF pourra éventuellement être ajouté en parallèle sur R2. Ce circuit pourrait fort bien être testé avec le circuit imprimé développé pour le symétriseur 013 :

alim_sym_013a_pcb_3d_front

   

Schéma 005

Vu dans un système de commutation audio "professionnel", une masse virtuelle réalisée avec un petit amplificateur BF intégré de type LM380.

masse_virtuelle_005

Avec LM380 à 8 broches
Le schéma reproduit ici ne correspond pas totalement à ce que j'ai vu, le LM380 utilisé était un modèle à 14 pattes et non à 8 pattes. Un potentiomètre additionnel était présent, pour ajustage précis de la tension de sortie à Valim / 2 (extrémités du potentiomètre sur bornes d'alim d'entrée - entre J1 et J2, et curseur sur la patte 1 du LM380 version 14 pattes). Ne soyez pas surpris si les entrées inverseuse et non-inverseuse de l'ampli LM380 ne sont pas câblées, c'est normal. J'ai essayé ce montage avec un LM380 à 8 broches, mais j'obtenais en point milieu de sortie (J4) une tension de 14 V au lieu de 12 V, pour une tension d'alim en entrée de 24 V. N'ayant pas de LM380 à 14 pattes sous la main, je n'en dirai pas plus.

Avec LM380 à 14 broches
Message de Dominique F. qui a essayé ce montage de masse virtuelle avec des LM380 à 14 broches.
Je suis tombé sur votre rubrique “Masses virtuelles” et j’ai un renseignement à vous fournir. En bas de page, vous proposez un montage (vu quelque part) utilisant un LM380 en signalant que vous n’aviez pas de 14 pattes mais seulement des 8. De mon côté, je n’ai que des grands modèles où les pattes 3, 4, 5 et 10, 11, 12 sont réservées au(x) refroidisseur(s). En faisant le montage sur une plaquette sans soudures, je me suis aperçu que les cinq LM380 essayés se mettent systématiquement à osciller et la sortie se bloque à un peu moins de 3 V lorsque ces pattes sont reliées à la masse ! Quand je les déconnecte de la masse, tout rentre dans l’ordre et avec 15 V en alim, j’obtiens 7,4 V en sortie et 9,6 V pour 20 V. Ce qui me paraît acceptable. Je sais que ces plaquettes sans soudures sont souvent sujettes à controverse (mauvais contacts et oscillations parasites en HF, etc.), mais je n’ai jamais eu de pb en BF. Dans cette application précise du LM380, je pense qu’il est donc déconseillé de relier ces pattes à la masse. J’espère que ce renseignement vous servira ainsi qu’à vos lecteurs (si vous pensez utile de le reporter dans vos articles).
Oui, cela me semble utile d'en faire part aux autres lecteurs. Merci Dominique pour ce retour d'expérience.

Autres solutions

Il existe sur le marché de l'électronique, des composants spécialement conçus pour ajouter une masse virtuelle. Le circuit TLE2425 de Texas Instrument qui se contente de trois pattes en est un exemple. Voir aussi le TLE2426, de la même famille.

Historique

01/03/2020
- Ajout information concernant le montage à AOP (schéma 002) quand la sortie masse virtuelle doit attaquer une charge capacitive élevée.
24/08/2014
- Ajout info concernant le pont diviseur résistif avec deux condensateurs (premier schéma du paragraphe Variations autour du schéma 001).
06/01/2013
- Ajout info symétriseur avec deux condensateurs seulement (schéma 001d).
29/01/2012
- Ajout informations concernant le montage avec LM380 à 14 broches, merci à Dominique F. pour ses retours d'expérience.