Electronique > Bases > Routage des circuits imprimés

Dernière mise à jour : 21/02/2010

Préambule

Le routage des circuits imprimés est une opération qui consiste à spécifier comment les signaux électriques tels que tension d'alimentation, signal audio ou vidéo, signal HF, vont aller d'un composant à un autre. En d'autres termes, à leur indiquer la route à prendre pour aller d'un endroit à un autre.
Il est des montages pour lesquels le routage n'a pas à suivre d'impératifs stricts. C'est le cas des utilitaires et gadgets "d'amusement" : jeux de lumière, alarme de température ou de débordement d'eau, système d'allumage automatique des lampes, anti-moustiques, etc. Par contre, il existe des montages où le routage des pistes et où le placement des composants revêt une grande importance. C'est le cas par exemple des montages RF (radio-fréquence), des montages audio, des alarmes, des convertisseurs analogique-numérique ou numerique-analogique (pour ces derniers, l'alimentation secteur revêt aussi une grande importance).

Distances

Tout comme vous-même êtes fatigué après un grand voyage, il est des signaux qui ne supportent pas bien les grands trajets. Pour ceux-là, il est nécessaire de raccourcir le plus possible la distance à effectuer. C'est le cas notemment des signaux vidéo ou HF.

Pollution ou Diaphonie

Le terme Diaphonie ne doit pas vous être totalement étranger si votre passion ou votre travail vous ammène à bosser dans la musique ou dans l'audio. Vous roulez sur une artère pleine de voitures (c'est les vacances, et ça commence bien...). Il fait chaud, vous n'avez pas la clim, alors vous ouvrez la fenêtre. Et là toute la pollution qui peut entrer dans le véhicule ne se fait pas prier. En arrivant, vous vous mouchez un bon coup, et horreur ! il y a plus de noir que de vert ! C'est un peu dégoutant ce que je dis là, c'est vrai. Mais l'idée est là : vous transportez un intrus, et vous n'y pouvez rien. Ah mais si, vous y pouvez quelque chose : prendre les petites routes de campagne désertées de tous ! Il y aura moins de pollution, c'est sûr ! La diaphonie, c'est celà. On fait emprunter à un signal, un passage qui va être pollué par un autre signal. A l'arrivée, on retrouve le signal principal, avec un peu de l'autre, qu'on ne souhaitait pas du tout ! En audio, par exemple, la diaphonie est souvent évoquée pour spécifier la qualité de la séparation entre deux voies audio qui devraient rester totalement distinctes : deux voies d'une console de mixage, ou plus simplement les voies gauche et droite d'un signal audio analogique. La diaphonie existe aussi pour les pistes des circuits imprimés. Deux pistes proches l'une de l'autre constituent un condensateur sommaire, qui va permettre un couplage entre elles et ainsi favoriser des "échanges interdits" entre des signaux. Ces échanges peuvent ne causer aucun soucis particulier (signaux numériques de part et d'autre) ou au contraire être catastrophiques (horloge numérique dans un signal analogique faible niveau). Il est donc primordial de connaitre la nature des signaux à véhiculer (fréquence, forme et niveau) afin de savoir précisemment s'ils risquent d'être perturbés ou de perturber, et ainsi de les router intelligemment, c'est à dire savoir isoler suffisement les signaux qui ne peuvent pas "s'entendre du tout" entre eux. Globalement, on peut dire que le routage prend une plus grande importance quand il s'agit de véhiculer des signaux dont l'amplitude est très faible ou possédant une fréquence très élevée (à partir de quelques MHz).

Largeur des pistes

Là, il suffit d'appliquer des règles mathématiques relatives à la résistivité des matériaux et à la section des conducteurs. Pour dire simple là encore : vous pouvez vous contenter de pistes d'une largeur de 0,5mm si les signaux à véhiculer ne possèdent pas de puissance, tels que signal audio bas niveau ou signal d'horloge (et si votre système de gravure le permet !). Par contre, il faudra impérativement réaliser des pistes d'une largeur plus importante dès l'instant où ces dernières véhiculent des signaux de puissance, tel que des alimentations de puissance ou des signaux audio amplifiés, à la sortie d'un amplificateur de puissance par exemple. Il est une pratique courante qui consiste à renforcer la piste en y apposant une bonne épaisseur de soudure. Cette façon de faire contribue à augmenter la section de la piste, et donc à abaisser sa résistivité.

Distribution des alimentations

Il y a tant de choses à dire sur ce sujet ! Restons-en au principal.
Une règle d'or : router les pistes d'alimentation (masse, tensions négatives et positives) en premier lieu, en s'assurant que toutes les parties du montage qui consomment le plus ou qui polluent le plus seront situées le plus près possible du connecteur d'alimentation. Ceci est primordial et permet de limiter les effets de pollution (signaux parasites et fluctuation des tensions) sur les parties des montages les plus sensibles (qui sont généralement celles qui traitent les signaux de faible amplitude).
Pour ce qui est de l'association de plusieurs sous-ensembles tirant leur énergie depuis une seule alimentation secteur (tranches de consoles de mixage, quadruple ou octuple préampli par exemple), il est impératif d'apporter un soin particulier à la distribution des alimentations. L'idéal est de câbler les alimentations en étoile, le point commun de l'étoile étant la sortie régulée de l'alimentation secteur. Vous pouvez aussi utiliser des pistes de circuit imprimé qui parcourent toute la largeur des modules, mais il faut dans ce cas renforcer ces pistes afin de réduire au maximum leur résistivité. Le renforcement peut s'effectuer par l'ajout d'une bonne couche de soudure, mais le mieux est encore d'utiliser une barre d'alimentation spécialement conçue pour cet usage. Vous pouvez acheter toutes faites de telles barres d'alimentation, mais l'inconvenient de ces dernières est qu'elles imposent un routage précis, car l'emplacement entre chaque borne d'alim est fixe, et peut ne pas correspondre à la topologie de votre montage. Une solution plus adaptable et plus économique consiste à réaliser vous même de telles barres, avec un fil conducteur de fort diamètre (4mm2 ou 6mm2 au minimum), et d'utiliser des plots, voir des cosses "poignard" pour piquer le jus sur la barre. Pour ma part, je préfère isoler totalement les modules les uns des autres, même si au final ils tiennent tous sur un seul et unique circuit imprimé. Le cablage en étoile de l'alimentation de chacun de ces modules est au final moins esthétique il est vrai, mais il correspond mieux à ce qui doit être fait.
Pour le côté esthétique de la chose, je prend souvent l'exemple d'un circuit imprimé d'un montage HF, tel qu'un préampli d'antenne TV par exemple. Si les composants sont tous parfaitement alignés, c'est que le concepteur du CI n'a pas fait de son mieux. Si au contraire vous voyez des résistances ou condensateurs montés selon des angles disgracieux, il y a de fortes probabilités qu'il s'agisse d'un excellent produit. Pourquoi ? Parce qu'en HF, ce n'est pas la qualité de présentation qui prime, mais la distance entre chaque composant qui doit être la plus faible possible. Pourquoi je dis celà ? Parce que nombre de concepteurs de CI, à leurs débuts tout du moins, tiennent absolument à réaliser un montage qui à de la "gueule". Et c'est d'autant plus vrai avec l'utilisation généralisée des logiciels de CAO. Or, je le répète, c'est bien plus le routage intelligent (je fais allusion à votre intelligence, pas à celle de l'auto-routeur de votre logiciel de conception de CI) des pistes qui doit dicter l'emplacement des composants. Et si certains composants doivent impérativement prendre place ça ou là, et bien il faudra conjuguer ces deux nécessités. Le routage est un art, quoi qu'on en dise !

Découplage des alimentations

Découpler les alimentations pour chaque partie (chaque fonction) du montage, consiste à placer un ou deux condensateurs (parfois avec une résistance additionnelle) sur chaque ligne d'alimentation (par rapport à la masse), et ce au plus près possible du circuit ou de l'ensemble de composants qui a ou peut avoir une influence sur la "stabilité" de la tension d'alimentation. Le découplage par condensateur permet en effet de constituer un réservoir d'énergie local, qui absorbe les variations de tension liées aux variations des demandes en energie, et d'éviter ainsi la répercussion de ces variations sur l'ensemble du montage. En fait, les variations de tension existent toujours, mais sont beaucoup plus localisées, et gènent moins les voisins...

Plan de masse côté composant

Pas toujours indispensable, il améliore cependant souvent les caractéristiques de bruit et de diaphonie. Je le conseille fortement pour les applications audio faible niveau (préampli microphone par exemple), et je le considère comme indispensable pour tout montage faisant intervenir de la HF (émetteur FM supportant la section BF et la section HF sur le même circuit imprimé par exemple). Idem pour les circuits mixant du numérique et de l'analogique, ainsi que pour les ordinateurs cadencés par un microprocesseur de fréquence supérieure à 33MHz. Qui en est là ? Pour ma part, je ne me souviens même plus de la fréquence de fonctionnement de mon Sinclair ZX81 en kit...

Mélanges analogique et numérique

S'il est des choses que les circuits électroniques n'aiment pas trop, c'est qu'on les prenne pour des fourre-tout. Il existe des règles simples, telle que limiter le plus possible la longueur des pistes et la mise en parallèle de pistes véhiculant des signaux très différents, sauf si on prend la peine de les séparer convenablement  (par un grand espace ou par une ligne de masse par exemple). Un point critique concerne le raccordement de circuits analogiques avec des circuits numériques. On pense bien sûr en premier lieu aux convertisseurs analogique / numérique ou numérique / analogique. Mais un simple vumètre à leds à base de LM3915 / LM3915 est aussi un convertisseur analogique numérique, puisque les leds sont commandées en tout ou rien (allumées ou éteintes), grâce à des comparateurs de tension dont la sortie travaille en mode logique alors que les entrées travaillent en mode analogique. La particularité première des circuits électroniques de type logique est de fournir des signaux dont les temps de montée et de descente sont rapides. De fait, ces signaux contiennent des harmoniques sur des rangs élevés, qui peuvent s'ajouter aux signaux utiles et les perturber. Un signal d'horloge (oscillateur) cadencé à 4 KHz peut ainsi rayonner autour de lui un signal parasite de 4 KHz, et en même temps rayonner des signaux parasites à 12 KHz, 20 KHz, 28 KHz, 36 KHz, etc... (harmoniques impaires). Si les signaux situés au-delà de 20 KHz ne vont à-priori pas se faire entendre dans un montage analogique (mais combinés à d'autres on peut se retrouver avec de nouveaux signaux tous frais et bien audibles), on voit bien que la composante 12 KHz risque d'être gênante. Et bien entendu, on n'a pas envie que notre signal audio si fragile soit pollué de la sorte, on a déjà assez à faire avec les problèmes de ronfletes. Quand un montage mixte analogique / numérique tire son énergie d'une unique alimentation, la perturbation de la section numérique vers la section analogique peut s'opérer par conduction, les variations de courant des circuits logiques se répercutant dans les circuits analogiques au travers des pistes du circuit imprimé. Et ce d'autant plus que les diverses parties ne sont pas assez "découplées" les unes des autres au moyen de pistes qui partent du bon endroit et de condensateurs de découplage judicieusement placés. La première action bénéfique pour un montage analogique / numérique est de disposer de deux alimentations complètement séparées : une pour la section analogique et l'autre pour la section numérique. Bien sûr, il y a des chances pour que les deux sections doivent se rencontrer en un point unique, qui sert de référence et qui pourrait fort bien être la masse. Ce qui signifie que les alimentations sont séparées... mais jusqu'à un certain point. Et ce point est critique, bien évidement (ce serait trop simple) ! Le routage des alimentations d'un circuit mixte analogique / numérique demande une certaines connaissance et une certaine pratique, on ne réussit pas du premier coup un convertisseur A/N avec un rapport signal / bruit de 100 dB ! Mais en ayant déjà connaissance de l'importance de la séparation des pistes, on part sur de bonnes bases. Il vaut parfois mieux rallonger certaines pistes d'alimentation et les faire partir ou revenir en un point précis et bien choisi, que de vouloir à tout prix faire des raccourcis parce que quelqu'un un jour a dit que le plus court était le mieux... D'autres perturbations se produisent par couplage capacitif (pistes rapprochées), et là le fait d'avoir une alimentation unique ou non n'y change pas grand chose. Il faut avoir une bonne notion des risques encourus quand on fait un circuit imprimé de faibles dimensions, avec des pistes fines et rapprochées les unes des autres. Certains cas ne peuvent être résolu que par le biais de circuits imprimés multi-couches, les circuits simple face et double face ne suffisant parfois plus.

En résumé...
Pour un montage électronique intégrant des fonctions analogique et numérique, il est très important de séparer le plus possible ces deux fonctions, au niveau alimentation et au niveau du tracé des pistes. Trouver le point de jonction unique entre masse analogique et masse numérique n'est pas si évident que ça, et demande parfois pas mal de tatonnements. Si vous décidez de construire vous-même un convertisseur analogique numérique (ou l'inverse), mieux vaut utiliser le dessin d'un circuit imprimé déjà fait et éprouvé, ou demander conseil à quelqu'un qui connait parfaitement le problème. Notez que parfois la chose est très délicate, surtout quand vous utilisez des circuits intégrés spécifiques qui mélangent analogique et numérique et qui ne possèdent d'origine qu'une seule paire de broches pour leur alimentation (CD4066, SAD1024 pour ne citer qu'eux). Notez qu'il est toutefois possible d'ajouter un vumètre à leds à une console analogique qui n'en n'est pas doté d'origine, sans que cela soit insurmontable... Il faut juste savoir où repiquer l'alimentation, et "isoler" correctement le circuit d'affichage pour éviter d'entendre des petits grésillements dans le signal audio de sortie quand les leds clignotent... Bref, chaque cas est un cas à part, mais avec un peu de bon sens on peut éviter le pire.

Plaques d'expérimentation

Peut-on se servir d'une plaque d'expérimentations pour réaliser un produit fini ? La réponse est : Oui, dans certains cas.
Il existe plusieurs types de plaques d'expérimentation. Des plaques avec seulement des pastilles rondes pré-percées, sans piste. Des plaques avec des pistes (bandes) pré-percées. Des plaques en bakélite et des plaques en epoxy. Des plaques avec plan de masse côté composants, d'autres sans. Etc. Voici ce que je peux conseiller.
- Pour les applications audio "niveau ligne" tels que symétriseur, distributeur audio ou ampli casque, vous pouvez sans soucis utiliser des plaques sans plan de masse.
- Pour les applications audio "faible niveau" tels que préampli micro ou ampli de réception HF, vous devez utiliser des plaques avec plan de masse. Mais attention, piège ! Vous ne devez pas vous servir du plan de masse pour raccorder les composants devant être reliés à la masse (ou seulement si vous êtes certains qu'à cet emplacement celà ne posera pas de problème de boucle de masse). Le raccord à la masse de ces composants devra être réalisé côté soudure, sur une piste dédiée à cet usage. Le plan de masse quant à lui doit être réalisé en un point unique, et relié directement à la sortie de l'alimentation régulée. J'attire votre attention sur le fait qu'il existe deux types de CI avec plan de masse : ceux dont le plan de masse est totalement isolé, et ceux dont le plan de masse est raccordé aux diverses pistes de masse (raccord sur chaque trou de la piste de masse). Je conseille l'usage des premièrs aux applications audio faible niveau, et l'usage des seconds aux applications HF.
- Pour les convertisseurs Analogique-Numérique et Numérique-analogique, vous devez utiliser des plaques avec plan de masse, mais avec impérativement une coupure dans le plan de masse séparant la partie analogique de la partie numérique (c'est pas toujours rigolo à faire, mais avec une petite perceuse équipée d'une fraise et avec un cutter, on s'en sort sans trop de mal). Dans tous les cas, tous les raccords entre composants devront être courts, et le montage devra être intégré dans un coffret métallique.